[Édito] De l'intérêt des plateformes chimiques pour concilier réindustrialisation et sobriété foncière
Le gouvernement a publié une liste de 55 premiers lauréats retenus qui bénéficieront d’un accompagnement sur mesure et deviendront de vrais sites « clés en main » au plus tard en 2030, pour faciliter la réindustrialisation. L’industrie chimique a, depuis fort longtemps, identifié l’intérêt de promouvoir cette logique de plateformes pour faciliter l'accueil de nouveaux entrants.
Parmi tous les obstacles à franchir pour arriver à concrétiser un projet industriel, un entrepreneur doit souvent résoudre la problématique du foncier. D’autant plus que les opportunités se font, et se feront, de plus en plus rares. Rappelons que la France s’est fixé, dans le cadre de la loi Climat et résilience adoptée en août 2021, l’objectif d’atteindre le « zéro artificialisation nette des sols », en 2050. Mais le gouvernement pense avoir trouvé la parade. Désormais, un porteur de projet pourra compter sur le dispositif « Sites clés en main France 2030 » qui a été pensé pour accélérer la mobilisation d’un foncier industriel de qualité, dans un contexte de sobriété foncière. En réalité, les contours du dispositif ont déjà été présentés, en mai 2023, par le président de la République, dans le cadre du projet de loi Industrie verte. La nouveauté, en ce mois d’avril, est que l’on a publié une liste de 55 premiers lauréats retenus pour bénéficier d’un accompagnement sur mesure et devenir de vrais sites « clés en main », au plus tard en 2030. Car en réalité, le dispositif prévoit que seuls cinq d’entre eux seront déclarés clés en main, dès cette année 2024. Vingt-sept ne le seront que sur la période 2025-2027 car il reste à mener des études, mais sans travaux majeurs ou démarches réglementaires importantes. Les vingt-trois sites restants ne seront déclarés « clés en mains » que sur 2027-2030. Ce sont des sites comprenant une grande part de friches, avec des travaux, études et démarches lourdes à effectuer, telles que le changement de Plan local d’urbanisme (PLU), etc.
Tout cela est très positif. Cependant, pour un chimiste, l’initiative ne flèche pas clairement les plateformes capables d’accueillir des activités dangereuses, voire Seveso. Par ailleurs, on ne retrouve pas dans la liste des lauréats l’intégralité des dix-huit grandes plateformes chimiques déjà identifiées par la profession, et qui, depuis 2019, communiquent sur leur foncier disponible. Ce sont notamment les plateformes des Roches-Roussillon, en Isère, de Chemesis, en Moselle, de Lacq, dans les Pyrénées-Atlantiques, de Fos-Lavéra-Berre, dans les Bouches-du-Rhône… Sur ces différents sites, les projets de réindustrialisation se sont multipliés. Chemesis est, en ce moment, sous le feu des projecteurs, avec la vente de l’usine Metex Noovista qui s’était récemment installée. Mais la plateforme s’est aussi illustrée par l’accueil d’Afyren, tandis que, parmi ses acteurs historiques, Arkema a encore des projets d’investissement dans les acryliques pour décarboner sa production.
Des sites chimiques labellisés "clés en main"
Pour autant, quelques sites connus pour leurs activités dans la chimie ont quand même reçu le nouveau sésame « sites clés en main ». Il s’agit, par exemple, des plateformes de Lacq et de Pardies, de Fos-sur-Mer, de Gonfreville-L’Orcher, en Seine-Maritime, de Pomacle dans la Marne, spécialisée en Bioéconomie, de Saint-Auban, dans les Alpes-de-Haute-Provence ou de la Société Chimique d’Oissel (SCO) et de Yara, en Seine-Maritime. Il est probable qu’elles accèdent, par ce biais, à quelques facilités supplémentaires. « Le label "clés en main ", cela signifie des durées courtes pour l’implantation industrielle, mais aussi un accompagnement par l’État pour les valoriser et accélérer au maximum les procédures administratives préalables à la première pierre », a complété Roland Lescure, ministre délégué en charge de l’Industrie. Dans tous les cas, rendons grâce à l’industrie chimique qui a, depuis fort longtemps, identifié l’intérêt de promouvoir cette logique de plateforme. Pour recycler du foncier, mais aussi pour proposer des compétences mutualisées et des synergies au cœur de sa recherche de compétitivité.