A Lyon, Arkema et Daikin poursuivis pour leur production de PFAS

Les usines lyonnaises de Daikin et Arkema, au cœur d'un contentieux impliquant les PFAS, comparaissent le 9 avril devant le tribunal judiciaire de Lyon. Le 4 avril, l'Assemblée nationale a voté l'interdiction de ces polluants éternels à compter de 2026, une mesure qui doit encore être approuvée par le Sénat.

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A Lyon, Arkema et Daikin poursuivis pour leur production de PFAS
La vallée de la chimie, près de Lyon, concentre producteurs et utilisateurs de PFAS, retrouvés en quantité anormale dans les captages d'eau de la métropole.

Mardi 9 avril, le tribunal judiciaire de Lyon (Rhône) examine en référé une plainte notamment de la métropole de Lyon contre deux industriels, Arkema et Daikin, accusés d’être à l’origine de la présence de PFAS dans les captages d’eau de la région. Les per- et polyfluoroalkylés (PFAS) sont des «polluants éternels», présents dans de très nombreux produits et présentent des risques pour le système immunitaire. Or un rapport parlementaire porté notamment par le député Modem du Rhône Cyrille Isaac Sibille, remis en février au gouvernement, identifie cinq sites français qui fabriquent et émettent des PFAS : Chemours dans l’Oise, Solvay dans le Jura et le Gard, Daikin et Arkema à Pierre-Bénite, près de Lyon.

Selon un rapport alarmant de l’Agence régionale de santé (ARS), qui a abaissé les seuils de mesure des PFAS dans les captages, 160 000 habitants de la région Auvergne-Rhône-Alpes sont potentiellement exposés, dont 120 000 dans la périphérie de Lyon. «La mise à niveau des captages d'eau potable va coûter entre 5 et 10 millions d'euros. Il est hors de question de faire peser cette dépense sur l'usager, qui est aussi une victime», résume Bruno Bernard, président écologiste de la métropole. En 2023, une dizaine de maires de l’agglomération lyonnaise avaient déjà porté plainte contre les industriels, pour mise en danger de la vie d'autrui. Mais leur plainte au pénal n'avance pas.

Une loi bannit les PFAS... sauf pour les ustensiles de cuisine

Le 4 avril, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture une proposition de loi du député écologiste de la Gironde, Nicolas Thierry, qui bannit les PFAS. Malgré l'opposition du ministre de l'Industrie Roland Lescure, le gouvernement préférant attendre que l'Union européenne se dote d'une réglementation valable dans tous les pays européens, le texte a été approuvé à l'unanimité, avec 186 voix pour et zéro contre. Il lui reste à franchir l’obstacle d’une adoption par le Sénat.

L'article principal du texte prévoit d'interdire à partir du 1er janvier 2026 la fabrication, l'importation et la vente de tout produit cosmétique, produit de fart (pour les skis) ou produit textile d'habillement contenant des «polluants éternels», à l'exception des vêtements de protection pour les professionnels de la sécurité et de la sécurité civile et des ustensiles de cuisine. Les 300 manifestants rassemblés devant l'Assemblée Nationale par les syndicats et la direction du groupe lyonnais Seb, qui produit une grande partie de ses poêles Tefal à Rumilly (Haute-Savoie), ont obtenu l'exclusion des ustensiles dont le revêtement contient des PFAS. Le gouvernement a également échoué à obtenir la suppression d'un article instaurant un principe de pollueur-payeur, avec une taxe visant les industriels qui rejettent des PFAS.

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Les nouveaux sites de Daikin et Arkema contestés

En région lyonnaise, l'industriel japonais Daikin a obtenu une autorisation pour une nouvelle unité de 1400 m2. Elle mettra en œuvre de nouveaux PFAS, que Daikin Chemical produisait jusqu’ici aux Pays-Bas. A une condition exigée par l'Etat : que l'industriel trouve des alternatives à ces produits d'ici 36 mois. Daikin ne veut pas dévoiler leur nature, «secret industriel oblige», défend un porte-parole.
L’association de riverains "Bien vivre à Pierre-Bénite" s'insurge contre cette autorisation. «Comment est-il possible d'autoriser 15 tonnes de rejets de PFAS par an, alors que l'on sait que la santé des riverains est en danger ?», proteste Thierry Mounib, président de l'association.

De son côté, Arkema aimerait bien s'étendre. Le chimiste a investi 4 millions d’euros pour réduire de 90% un PFAS, le 6:2 FTS, qui sert à fabriquer des PVDF, des polymères que l'on retrouve dans des batteries et des composants électroniques. «Cette solution réduit les rejets du site de plus de 90 %. Et l’utilisation de ce produit cessera d'ici fin 2024», assure-t-on chez Arkema. Les 3,5 tonnes de rejets par an d'Arkema, mentionnées dans un rapport de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD), ne correspondent pas à la situation actuelle, selon Arkema qui assure rejeter désormais moins de 1 kg par jour en moyenne.

L'agroalimentaire concerné

Des entreprises lyonnaises qui utilisent l'eau du robinet pour leur process sont aussi concernées. C'est le cas d'Européenne d'embouteillage, filiale française de Suntory, qui exploite quatre usines en France, et emploie 1300 salariés. Le géant japonais des boissons est notamment propriétaire des marques Orangina, Oasis et Schweppes. Son usine de Meyzieu (Rhône) exploite un forage sur la commune voisine de Jonage, un des cadres captages du Rhône déclaré non conforme par l'ARS. Le site, qui peut s'approvisionner sur d'autres captages, est privé d'un quart de son approvisionnement en eau, une matière première essentielle. «Notre forage de Jonage reste conforme aux seuils de qualité (NDLR: exigés pour la consommation), il ne dépasse pas le seuil de risque sanitaire et l'ARS n'a pas restreint l'usage de l'eau», insiste l'entreprise. Européenne d'embouteillage a installé des filtres à charbon actif. «Nous étudions une solution à plus long terme», indique l'entreprise, qui n'envisage pas un transfert de la production.

Le jugement en référé contre Arkema et Daikin devant le tribunal judiciaire de Lyon est attendu dès ce mardi 8 avril au soir. Quant à la loi anti-PFAS, elle pourrait être présentée au Sénat le 30 avril par le groupe écologiste.

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