300 salariés du fabricant d’électroménager Seb manifestent à Paris contre la loi PFAS… aux côtés de la direction

Plus de 300 salariés des usines du groupe Seb, fabricant de produit électroménagers, ont manifesté aux côtés de membres de la direction ce mercredi 3 avril à Paris. Ils fustigent la proposition de loi visant à interdire les PFAS à partir de 2025, débattue à l’Assemblée nationale le jeudi 4 avril.

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300 salariés du fabricant d’électroménager Seb manifestent à Paris contre la loi PFAS… aux côtés de la direction
« Les fluoropolymères, utilisés par le Groupe SEB sont reconnus pour leur innocuité et leur conformité aux normes environnementales les plus strictes. Je ne crois pas que les services de contrôle de l’état puissent contredire les affirmations de nos dirigeants », avance prudemment Mickaël Feuvre, coordinateur de la CFDT sur le site industriel de la ville de Mayenne.

Direction, syndicats et salariés derrière une même bannière, l'image n'est pas si fréquente. «On va se battre jusqu’au bout», tonne, sous la tonnelle blanche floquée Force Ouvrière, Thierry de La Tour d’Artaise, le président du groupe Seb (Tefal, Moulinex…). Face au patron, les salariés en gilets jaunes floqués FO agitent les fanions rouges et entrechoquent les poêles. Arrivés grâce à des bus partis des usines du groupe à Lourdes (Hautes-Pyrénées), Rumilly (Haute-Savoie), Mayenne, Selongey (Côte-d’Or), plus de 300 salariés du fabricant de produits d’électroménager Seb se sont rassemblés aux côtés de membres de la direction sur l’esplanade des Invalides, près de l'Assemblée nationale à Paris, ce mercredi 3 avril.

En ligne de mire des manifestants, une proposition de loi visant à interdire la fabrication de tout produit contenant des PFAS à partir de 2025. Présentée jeudi 4 avril à l’Assemblée nationale par le député Nicolas Thierry (EELV), elle vise sans distinction toutes les molécules de synthèse de cette famille. «Au regard des milliers de composés que représentent les PFAS, l’action publique ne sera efficace que dans la mesure où elle sera envisagée de manière systémique», justifie le texte. Elle inclurait ainsi le PTFE utilisé dans un produit phare du groupe industriel : la poêle antiadhésive de sa marque Tefal. Or l'innocuité de cette famille de PFAS n’a pas été prouvée scientifiquement dans des conditions de cuissons standards selon les arguments de la direction.

La direction du groupe Seb appelle les syndicats à l'aide

Pour combattre le projet de loi, le groupe industriel n’a pas hésité à faire un appel du pied aux syndicats. «On a reçu un communiqué de la direction du groupe Seb invitant les 5 500 salariés à se rendre aux invalides à 14 heures. Ce n’est pas une paille : l’appel concerne tous les sites industriels du groupe», lance Mickaël Feuvre, coordinateur de la CFDT sur le site de Mayenne, s’élançant à grande foulée vers la manifestation. «L’entreprise a participé à l’affrètement des bus», souffle, sibyllin, Frédéric Piskorski. Les salaires de la journée seront également payés. Derrière ses lunettes cerclées dorées, le directeur des usines Tefal à Rumilly regarde les syndicats s’activer sous les tonnelles. «Le tableau est atypique», concède en souriant le directeur d’usine plongé au milieu des banderoles "Touche pas à ma poêle".

Côté patronat, les raisons de la mobilisation sont simples. «Il y a deux types de PFAS : les bons et les mauvais. Nous utilisons les bons», résume Frédéric Piskorski, tentant de porter sa voix par-dessus la sono crachant les grands classiques des chants syndicaux. «Aujourd’hui, nous ne connaissons aucun substitut industriel au PTFE dans la fabrication de poêles antiadhésives.» Dans sa communication, la direction brandit donc le risque pour l’emploi si la loi est adoptée : 3 000 postes seraient directement menacés par l’interdiction.

Prudence des syndicats

Côté syndicats, le tableau est un peu plus nuancé. «On marche sur des œufs», concède Mickaël Feuvre, dont le syndicat avait notamment signé le Pacte du pouvoir de vivre, visant à intégrer l’urgence écologique dans ses propositions. «La direction nous indique qu’on ne peut pas changer en quelque mois notre processus de fabrication, et on l’entend. Mais on doit tout de même réagir. Que ferons-nous demain si les consommateurs ne veulent plus de nos produits ?», interroge le quadragénaire. L'homme porte son regard en direction de banderoles "l’écologie oui, nos emplois aussi" hissées au-dessus de la foule.

Symbole de la prudence des syndicats, la CGT n'a pas pris part au rassemblement sur l’esplanade des Invalides. Sa secrétaire générale, Sophie Binet, a fustigé «le silence politique et médiatique assourdissant» sur la question du PFAS dans les colonnes de L’Humanité ce lundi. «Se répète le schéma observé sur l’affaire de l’amiante, que la France a reconnu très tard comme toxique. Avec les conséquences que l’on sait sur la santé», indiquait la syndicaliste dans le quotidien.

Dans un coin de la manifestation, des maires du canton de Rumilly sont là. Mains dans les poches, l’un fait mine de vérifier que son écharpe tricolore est bien accrochée, l’autre semble chercher quelqu’un du regard. Comme les syndicats, ils hésitent. «Notre canton compte 10 000 emplois : Tefal en représente 1 700», assène Roland Lombard, maire d'Hauteville-sur-Fier depuis 23 ans. «On ne souhaite pas opposer PFAS et emploi. En tant qu’élu, nous sommes d’ailleurs tenus, par exemple, de traiter nos eaux contre ces substances», nuance François Ravoire, maire de Vallières-sur-Fier. «Mais Tefal, c’est notre poumon économique. Cette loi fixe le cap de début 2025 : doit-on vraiment aller si vite ?», s'interroge l’élu.

Les salariés du groupe Seb n'ont pas peur des PFAS

Les salariés du groupe Seb ont-ils, eux, des craintes pour leur santé ? «Je fais confiance à nos laboratoires, ils font des études poussées», lance Sébastien Gorczyca, salarié depuis 14 ans à Selongey, vêtu de son gilet jaune FO. «Nos équipes chimies vont au-delà de la réglementation, nous avons un service réglementaire rigoureux et effectuons des contrôles stricts», défend Anne, salariée en innovation sur le site Tefal de Rumilly depuis 13 ans, tenant à bout de bras un fanion blanc CFE-CGC. « Bien sûr que non je n’ai pas peur », sourit Naïma Kassi, 45 ans, salariée à Tefal. «Rumilly, c’est Tefal. Il y a même une poêle à l’entrée de la ville. Mes parents utilisent les poêles Tefal, je les utilise aussi.»

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